vendredi 7 septembre 2007

Physalis

Myriam Fantin


C’est juste un trois-pièces. Pas très grand évidemment, mais j’ai eu de la chance, au départ je devais obtenir plus petit. Il y a deux chambres, un vrai salon avec un canapé, une télé. La cuisine et la salle de bains rutilent. C’est Virginie qui a téléphoné pour tout organiser, j’étais content qu’elle le fasse. Elle a choisi un week-end, beaucoup plus pratique pour Marie. Je voulais discuter avec elle, de l’avenir, de ses projets, de mon retour. Tout est très calme dans l’appartement, on n’entend ni la rue ni les bruits du couloir.

Depuis mon arrivée ici, le temps m’a semblé long, trois ans. Je ne suis pas sorti une seule fois. Et j’ai un bail de six ans. Marie est arrivée avec sa mère, comme prévu.

Virginie n’est pas restée. Après son départ, Marie a regardé autour d’elle d’un air apeuré, moi j’étais inquiet. Est-ce que cet endroit allait lui plaire, après tout, je n’avais rien choisi. Regarde, lui ai-je fait remarquer, il y a une terrasse avec des fauteuils de jardin. Tu pourras bronzer. Les meubles n’avaient aucun style particulier, la moquette grise, les murs, discrets, beige chiné, étaient à peine rehaussés par quelques reproductions de tableaux signés Seurat, je crois. De loin, les arbres et les personnages paraissaient entiers, mais de près, on voyait nettement les pointillés, les miettes qu’il fallait recoller pour que l’image paraisse complète. Ça me mettait mal à l’aise. Dans la chambre, le papier était bleu ciel, avec quelques nuages blancs, Marie a remarqué le coffre à jouets bien garni, mais à douze ans, elle ne risquait pas d’y toucher. Alors m’est revenue l’angoisse, l’impression de n’être personne. J’ai cherché à me raccrocher à son regard.

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