Big Ji
Aurélie Champagne
Au bar, elle est assise à sa table. La petite contre la fenêtre, elle s'assoit toujours là. Un soir sur deux, elle s'y trouve, elle y fait ses petites affaires et son visage se fend d'un large sourire dès qu'elle me voit. Elle est moche, mais je prie tous les jours pour la croiser au cours de ma première tournée. Elle me porte chance. Namasté ji , elle me lâche. Comme toujours. Iek karidati dijié. Elle dit toujours ça. Deux phrases auxquelles s'ajoutent dania bad. Un reste de vocabulaire qu'elle a ramené de ses vacances à Goa en 1999. Elle dit qu'elle entretient son hindi avec moi, elle se tourne vers ses copains quand elle en a et elle m'appelle son chouchou. Elle est moche. Jamais osé lui dire que karidati c'est légume, et pas rose. Alors je l'écoute me demander un légume à chaque fois que je la croise. Alentour, il n'y a jamais personne pour la contredire. ça fait quatre ans et pas loin du double que je parle un français courant. Elle est moche, putain, mais elle me porte bonheur. Faut pas trop chercher avec ces trucs-là, pourquoi ça fait cet effet-là et pourquoi ça le fait plus. Comme elle a l'air de m'apprécier, je lui donne des roses de la veille ou de l'avant-veille, celles qu'on ne déballe pas du plastique sans les décapiter. Elle, elle s'en fout, elle n'est pas regardante et ses copains non plus.
Des couples, j'en vois à longueur de journées, à longueur de trottoirs, de cafés, de restaurants, de bistrots, d'assiettes. A longueur de cuites, j'en vois. Je suis vendeur de fleurs. ça fait quatre ans. Et pour se payer ma tronche, ces gros cons de Tamouls m'appellent Big Ji.
Au bar, elle est assise à sa table. La petite contre la fenêtre, elle s'assoit toujours là. Un soir sur deux, elle s'y trouve, elle y fait ses petites affaires et son visage se fend d'un large sourire dès qu'elle me voit. Elle est moche, mais je prie tous les jours pour la croiser au cours de ma première tournée. Elle me porte chance. Namasté ji , elle me lâche. Comme toujours. Iek karidati dijié. Elle dit toujours ça. Deux phrases auxquelles s'ajoutent dania bad. Un reste de vocabulaire qu'elle a ramené de ses vacances à Goa en 1999. Elle dit qu'elle entretient son hindi avec moi, elle se tourne vers ses copains quand elle en a et elle m'appelle son chouchou. Elle est moche. Jamais osé lui dire que karidati c'est légume, et pas rose. Alors je l'écoute me demander un légume à chaque fois que je la croise. Alentour, il n'y a jamais personne pour la contredire. ça fait quatre ans et pas loin du double que je parle un français courant. Elle est moche, putain, mais elle me porte bonheur. Faut pas trop chercher avec ces trucs-là, pourquoi ça fait cet effet-là et pourquoi ça le fait plus. Comme elle a l'air de m'apprécier, je lui donne des roses de la veille ou de l'avant-veille, celles qu'on ne déballe pas du plastique sans les décapiter. Elle, elle s'en fout, elle n'est pas regardante et ses copains non plus.
Des couples, j'en vois à longueur de journées, à longueur de trottoirs, de cafés, de restaurants, de bistrots, d'assiettes. A longueur de cuites, j'en vois. Je suis vendeur de fleurs. ça fait quatre ans. Et pour se payer ma tronche, ces gros cons de Tamouls m'appellent Big Ji.
Libellés : ssis
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